Lettre des mouvements du Thaurion, qui s’oppose au projet d’usine à pellets de Guéret, lue le 2 décembre devant la mairie de Guéret.
Il a été transmis à 20 communes qui adhèrent au « Syndicat des eaux de l’ardour », à la mairie de Guéret, à la préfecture et à Mme Couturier, députée de la Creuse.
Il est le fruit du constat alarmant de cette omerta qui règne depuis des années sur la qualité de l’eau directement impactée par les activités humaines. Encore aujourd’hui nous trouvons que la place de l’Eau dans le débat n’est vraiment pas mise en avant et nous avons essayé de faire un peu de vulgarisation pour sensibiliser les élus. Du fait de notre statut d’Association de fait, nous savons déjà que plusieurs secrétariat de mairies ne l’ont pas fait suivre. Nous espérons qu’il soit publié très prochainement sur la Montagne.
Les Mouvements du Thaurion
Mesdames et Messieurs les élus,
En 2020, des substances ont été retrouvées dans les eaux de surface de 93 départements. N’étaient pas concernés : la Corrèze, la Dordogne, le Tarn, la Guadeloupe et la Martinique. Ces chiffres sont désormais dépassés et sous-évalués : en cause, le modèle agricole intensif et l’utilisation outrancière des produits phytosanitaires encouragés par la Fédération Nationale des Syndicats Agricoles et l’industrie chimique.
Malgré les alertes répétées des scientifiques, rien ne change (exemple : le Glyphosate, prolongé pour 10 ans). Le modèle forestier intensif qui frappe aujourd’hui notre pays utilise lui aussi l’apport de produits chimiques. Au-delà de l’impact sur le climat, le fait est que les sols sont ravagés après les coupes à blanc, le dessouchage et la valorisation abusive de tout ce qui devrait rester au sol pour le nourrir lui et ses habitants. L’eau a beaucoup de mal à y pénétrer correctement pour reprendre son cycle. Elle ruisselle et vient polluer nos cours d’eau sans pouvoir bénéficier de sa filtration naturelle (1).
Dans ces sols appauvris, les nouveaux plants sont traités, en pépinière et sur le terrain : d’une part pour accélérer leur croissance, et d’autre part pour les protéger des attaques dont ils sont victimes puisqu’il ne reste plus rien à manger autour d’eux quand la faune réinvestit les lieux après le traumatisme causé par les coupes rases. Tous ces produits se retrouvent dans l’eau que nous buvons engendrant des conséquences désastreuses (2).
Les seuils de tolérance de potabilité publiés par l’Agence Régionale de Santé sont sans cesse réévalués au détriment de la santé publique. Il va de soi que l’eau « minérale » en bouteille, en plus d’être génératrice de déchets plastiques, est concernée par cette contamination.
Jeudi 16 novembre 2023, deux réunions se sont tenues à Guéret : le Conseil Communautaire d’Agglomération et le Conseil Municipal. Les Mouvements du Thaurion y ont assisté. Lors du Conseil Communautaire qui s’est tenu à la Bibliothèque, Mr De Cockborne, Président Directeur Général de Biosyl, a présenté son entreprise avec l’appui de Mr Rachez, Directeur Général d’Unisylva Limousin, actionnaire principal du projet.
Biosyl a pour particularité d’avoir développé un pellet fabriqué à 70% de feuillus tandis que celui de ses concurrents est réalisé avec des résineux. A notre grand étonnement, aucun débat contradictoire n’a eu lieu. Toute la controverse autour de la provenance du bois issu de coupes rases mise en lumière par l’association Canopée (3), les désagréments liés aux bruits incessants dus au fonctionnement en 5×8 (4), les émanations de poussières autour du site rendant l’air saturé en microparticules (5) et l’incendie survenu à l’usine de Cosnes-Cours-sur-Loire (6) n’ont pas été abordés.
La Communauté d’Agglomération, présidée par Mr Correia, est prête à céder les terrains. La majorité à la Mairie de Guéret est moins encline à valider ce projet. Après étude du dossier, il s’avère que tout n’a pas l’air aussi beau que sur le papier et Mme Fournier, Maire de Guéret, a émis des réserves. La délibération devant valider l’enregistrement ce jour-là s’est donc transformée en demande d’autorisation auprès de la préfecture. A ce sujet, Mme Frackowiak-Jacobs, Préfète de la Creuse, a reçu la semaine dernière une délégation sur demande de Mme Couturier, Députée de la Creuse.
Des argumentaires témoignant des dangers d’un tel projet pour les forêts, la biodiversité, le développement territorial et sur le fonctionnement de l’usine ont été apportés. Mme la Préfète a ensuite rassemblé l’ensemble des services territoriaux et a reçu Mr De Cockborne en fin de semaine. Une conférence de presse a été organisée mercredi 29 novembre au matin en préfecture pour statuer sur le projet.
Le basculement en procédure d’autorisation n’aura pas lieu (7). L’enquête publique non plus. Mme la Préfète a deux mois pour délivrer son arrêté préfectoral. Elle indique d’ores et déjà vouloir délivrer cette autorisation d’exploiter sous des contraintes prescrites.
Deux usines à pellets de résineux gérées par la SAS Combrailles (Jarnages et St Dizier-Masbaraud) sont actuellement en construction. Les volumes de bois prochainement extraits par ces trois entreprises vont impacter la biodiversité et considérablement modifier le paysage et notre environnement.
La protection de nos ressources est l’affaire de tous. Beaucoup d’élus commencent à prendre le sujet très au sérieux. Cependant, il existe d’autres moyens de gestion forestière que ceux encouragés par le Plan de relance et déployés par Alliance Forêt Bois, Unisylva, CFBL et consorts … Lorsque l’on connaît la situation du département en terme de passoires thermiques, les subventions (5M d’euros pour Biosyl) seraient plus utiles si dédiées à l’isolation des foyers.
Les forêts sont en grande partie privées mais les conséquences sont publiques et nous sommes tous concernés. Les Municipalités ont leur rôle à jouer dans le contrôle des chantiers. Elles ont un devoir d’information auprès des propriétaires terriens sur les risques et conséquences liés à la gestion industrielle.
La qualité de notre eau est menacée. Si cette hérésie continue, le service public devra absolument se moderniser afin d’offrir une eau saine, à tous nos concitoyens et aux générations futures.
C’est pourquoi nous pensons que vous devez dès à présent porter ces débats au sein des intercommunalités qui récupèreront la gestion des réseaux au plus tard en janvier 2026.
Les Mouvements du Thaurion proposent de vous accompagner par des actions de sensibilisation. Si vous souhaitez nous rencontrer, vous pouvez nous contacter par mail : lesmouvementsduthaurion@protonmail.com
Nous vous adressons nos meilleures salutations.
Les Mouvements du Thaurion
Initiative Citoyenne
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